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| Sujet: Reda Doumaz Musique algérienne, musique arabe ? Mer Juin 25 2008, 17:23 | |
| Reda Doumaz : «Je soutiens la non-arabité de notre musique» Interprète, auteur et musicien de chaâbi, il a produit récemment un nouvel album nommé Vestiges. Vestiges d’une maghrébinité, d’une algérianité qui, au fil du temps et depuis l’avènement de l’andalou au moins, demeurent peu connus du grand peuple, sinon enfouis par ceux qui ne veulent appartenir qu’à l’arabité. Par Mohamed Redouane Esprit bavard : Quelle est la place de la chanson ou de la musique algérienne dans ce qui est appelé communément chanson ou musique arabe ?
Réda Doumaz : Grâce au génie de ses acteurs, auteurs, compositeurs, chanteurs, l'art lyrique algérien en général a su tirer profit de toutes les influences qui ont eu à se retrouver sur cette terre d'Algérie depuis la nuit des temps. Ceci dit et sans entrer dans les détails, les sacs et ressacs artistiques depuis Zyriab ont modelé notre musique jusqu’à en faire une sonorité et lui donner une façon bien algérienne d'exécution, distincte de ce qui se pratique ailleurs. Déjà, dans le Maghreb et très loin de ce que les Arabes et les Occidentaux dénomment musique arabe ou orientale, peut-on imaginer Oum Kaltoum, Abdelwahab, El Anka, cheïkha Rimiti dans les mêmes bacs à la Fnac sous l'étiquette musique arabe/orientale ? C'est une erreur monumentale que j'ai activement dénoncée dans les années 1990 auprès de la Fnac jusqu’à obtention d'emplacements spéciaux pour le chaâbi, l'andalou, le raï et à la fin une classification des grands noms maghrébins dans les musiques du monde. Bien sûr, ça n'a pas été facile, mais avec mes connaissances réduites en musiques comparatives, j'ai pu convaincre les responsables de la Fnac malgré les réticences de plusieurs Maghrébins qui ne voyaient pas la différence, et je vous épargne les détails techniques. Aussi, je soutiens toujours la non-arabité de notre musique en dépit des mouwachahate, quelques instruments très arabes, etc. Le plus paradoxal dans cet enjeu, c'est que ce sont les plus grands artistes d'expression amazighe comme Zerouki Allaoua, Cherif Kheddam et d’autres qui se sont évertués à composer des musiques très orientales et de très bonne facture, mais c'est là une autre question à débattre… La musique algérienne se réclame-t-elle de cette arabité que ce soit en termes de sonorités ou de textes ? La musique algérienne ne devrait en aucun cas se revendiquer de "cette arabité" malgré les quelques sonorités partagées, sinon que ferions-nous des autres modes et sonorités (méditerranéens, perses, asiatiques…) existants et persistants dans tout le Maghreb ? Que ferions-nous de notre zorna, ithebbalene, gnawa, karkabou, etc. ? Que nous restera-t-il de notre maghrébinité et de notre africanité ? C'est aussi un autre débat. Alger capitale de la culture arabe, qu’est-ce que ça vous a rapporté, vous qui vous identifiez à l’algérianité ? Je pense que cet évènement ne nous a rien apporté d'arabe en dehors des semaines culturelles algériennes qui nous ont permis de nous remémorer certains plats traditionnels ou certaines danses traditionnelles. Les semaines culturelles des pays arabes ont été savamment mises hors de portée du petit peuple. C'était des huis clos entre VIP. Pourquoi ? Est-ce peut-être pour cacher au peuple sa non- arabité !? Quelle que soit l’arabité dont vous vous réclamez, quel est votre apport à la chanson ou à la musique, arabe ou algérienne ? Je ne me réclame d'aucune arabité. J’ai toujours clamé haut et fort mon algérianité et ma maghrébinité culturelle et cultuelle, le seul apport que je pense avoir donné à la culture maghrébine en général est cette opportunité d'ouverture d'esprit qui me permet d’amener le grand public à partager avec moi toutes les influences sonores et modales que je ne cesse de rencontrer et d’emmagasiner pour les Algériens et tous les Maghrébins qui sont les miens.
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