actes de pillage, destructions de biens et agressions
La face cachée du hooliganisme algérien
Par :Mustapha Mohammedi
Le hooliganisme chez nous obéit à l’évidence à d’autres motifs, à d’autres ressorts que ceux qui agitent le football européen, parce que mû par d’autres leviers : la malvie, les frustrations, le désespoir, la hogra et l’absence totale de perspective d’avenir.
Au plus fort de la violence dans les stades en Europe, les hooligans nous ont habitués à deux tactiques pour noyer leurs défaites et venger leurs couleurs.
Soit, ils déclenchent une bagarre épique avec les supporters de l’équipe adverse à coups de bouteille et de tessons au beau milieu des gradins, soit ils les prennent à partie à la sortie des pelouses… et c’est la fête des petits gabarits !
Les hooligans français, par contre, ont considérablement amélioré la matrice : ils écrivent leurs insultes sur des banderoles géantes au sommet des tribunes pour que tout le monde les voit, comme ce fut le cas pendant le match PSG-Roubaix où les gens du Nord ont été traités de Chtis de m…
La France entière a été choquée. L’offense est grave. Très grave. Inutile de vous dire que les sanctions les plus dures ont plu sur le club sous forme pénale, disciplinaire, administrative, et que sais-je encore afin que pareil écart ne se répète jamais plus. Le sport devant rester un sport, un challenge entre gentlemen. À notre connaissance, l’incident a été réglé dans le prétoire d’un tribunal. Blessure morale pour les uns, dommages financiers pour les autres, mais tout le monde en fin de compte est sorti indemne de l’aventure, en un seul morceau. Il n’y a eu ni bris de glace, ni pneu enflammé, ni œil poché. Le hooliganisme chez nous, ou ce qu’il faudrait peut-être apparenter en phénomène, obéit à l’évidence à d’autres motifs, à d’autres ressorts parce que mû par d’autres leviers : la malvie, les frustrations, le désespoir, la hogra et l’absence totale de perspective d’avenir.
La preuve : les supporters du MCO, au coup de sifflet final qui annonçait la descente aux enfers de leur club, ne se sont à aucun moment pris aux tifosis de Chlef.
Bien au contraire, ce seront deux joueurs du Mouloudia qui se donneront en spectacle en se crêpant méticuleusement le chignon en bordure de touche.
Seconde remarque, et de taille celle-là : alors que l’équipe déchue était en route vers son port d’attache, le gros bataillon de supporters sur place, comme par délégation de violence, jettent leur rage et leur fureur sur tout ce qui leur tombera sous la main : feux tricolores, mobilier urbain, cabines téléphoniques, sans même faire l’effort de se poser la question la plus bête de toutes : “Et si notre club, après tout, manquait de performance ?”
Troisième remarque : ce qui devait au départ n’être qu'une manifestation de dépit collectif se transformera au fil des heures en émeutes pures et simples planifiées et commanditées curieusement à partir des quartiers les plus sensibles et les plus en marge de la ville.
Quatrième remarque : ces émeutes auxquelles prendront part de nombreux adolescents, qui adorent jouer au chat et à la souris avec la maréchaussée, tourneront très vite en scènes de vandalisme et de pillage. Des bus seront calcinés, des voitures seront brûlées, des dizaines de magasins seront vidés de leurs produits et de leurs articles.
Des commerçants perdront jusqu’à 700 millions de marchandises. Et ce n’est pas fini car la spirale de cette dérive touchera même les hameaux à l’extérieur d’Oran comme Chtaïbo, Si Maârouf, Douar Belgaïd où des délinquants et des récidivistes tenteront, mais sans succès, d’imiter les razzias oranaises et de faire main basse sur tout ce qui a de la valeur.
Depuis quand et dans quel pays au monde, des supporters déçus s’attaquent-ils à un hôpital ? C’est ce qui a failli arriver au CHUO si ce n’est l’intervention des riverains qui se sont courageusement opposés à la mise à sac de l’établissement. Il faut lever le voile sur ces manifestations. Leur caractère sportif est dépassé. Nous assistons bel et bien à Oran à des éruptions maffieuses inconnues longtemps contenues et qui, profitant de l’échec populaire d’un club, ont littéralement débordé sur la ville.
MUSTAPHA MOHAMMEDI