Le poisson, qui reste incontestablement le plat favori des Bénisafiens, sera-t-il, comme d'habitude, chaque soir à l'heure du f'tour sur la table ? Pas sûr pour le moment, car les prix affichés en ce début du mois de ramadhan, à l'exception de celui de la sardine (fort heureusement, d'ailleurs), ont tous grimpé. Déjà très prisé, il fallait certes s'attendre à débourser fortement pour l'acheter en ce mois des appétences. Encore qu'en été, la pêche au large est souvent moyenne, certains fruits de mer valant leur pesant d'or.
Un tour ce jeudi, 6e jour du ramadhan, à la pêcherie du port nous suffit pour confirmer. Ce lieu est envahi chaque jour par plusieurs centaines de gens venues de tous les horizons pour s'approvisionner en poissons frais. Dès 14 h, la pêcherie devient une véritable fourmilière où il devient très difficile de se frayer un chemin entre les caisses entreposées à même le sol. On y trouve tous les poissons et de toutes les tailles (même ceux qui n'ont pas la taille marchande) et à tous les prix. Ces prix font grincer les dents à plus d'un.
Par où commencer, par le rouget ? Le rouget qui, il y a une semaine, était proposé à 700 dinars le kilo, est passé à 1.200 dinars, voire plus pour celui des profondeurs, appelé rocca, proposé 100 dinars de plus. Le merlan, ce beau poisson gris (mais toujours de la catégorie des poissons blancs), souvent rondelet, est à 1.300 dinars, la crevette à 1.700 et la langoustine (pour ceux qui veulent manger résistant), on ne vous la mettra pas sur la balance à moins de 2.000 dinars. On parle toujours du kilo ! Plus calibrée, la langoustine atteint aisément les 2.500 dinars.
L'autre catégorie de poisson blanc, appelée communément 2e, comme le mister, le pageot ou encore le poisson vendu à la pièce, c'est 700 dinars ou rien. Si vous cherchez de l'espadon, vous n'en trouverez pas car ce n'est pas la saison. Seulement, vous pouvez toujours trouver le similaire, de la bistna ou du requin blanc. Et là c'est 1.400 dinars le kilo. Reste enfin le poisson de toutes les sauces, ou plutôt de toutes les bourses, la sardine ou le sorel. Ce dernier est à 120 dinars le kilo, un peu moins cher que l'ébonite (si vous en trouvez toujours). Le petit sorel, utilisé souvent pour la soupe de poisson, est vendu à la chope, 50 dinars la chope, qui peut peser jusqu'à 2 kg.
Quant à la sardine (appelée le poisson du pauvre), elle est proposée, depuis le début du ramadhan, à 50 dinars, soit la moitié de ce qu'elle était avant. Et à ce prix, elle devra garder toutes ses chances pour farcir chaque soir les poêles des ménagères.
«Pourquoi de telles hausses ?», demande une femme d'un certain âge, qui, à son langage, semble venir d'une autre région. La réponse est toute donnée par le revendeur : «Ya yamma, c'est l'offre et la demande», (décryptage : la seconde est supérieure à la première). «Rien que ça ?», ajoute son accompagnateur, plus jeune. Il ajoutera : «Mais où sont donc tous ces gros navires importés d'Espagne et de Turquie que l'Etat a financés pour relancer l'industrie de la pêche ?». Aucune réplique du revendeur, qui déjà parle à d'autres clients.
Enfin, pour ceux qui veulent le savoir, chez nous, la consommation moyenne de poisson est de l'ordre de 5,7 kg par personne et par an, alors que le seuil de consommation annuel défini par la FAO est estimé à 8 kg par an et par personne.
par Mohamed Bensafi
Le Quotidien d'Oran.